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Lankhor - 1990


TEST sur Amiga


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INFORMATIONS

Genre :

Aventure

Sortie :

1990

Développeur :

Lankhor

Langue :

Français

Support(s) :

Amiga, Atari ST, DOS

PEGI :

7
CONCEPTION

Illustrateur boite :

Dominique Abraham

Scénariste :

Sylvian Bruchon

Atari ST


Compositeur :

André Bescond

Graphiste :

Dominique Sablons

Programmeur :

Jean-Luc Langlois, Bruno Gourier, Christian Droin

Synthése Vocale :

Béatrice Langlois

PC


Graphiste :

Stéphane Polard
INTERVIEWS
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PLAYLIST
LANKHOR
[1987] No : Never Outside
[1987] Manoir de Mortevielle, Le ./images/jeux/manoir_mortevielle.gif
[1988] Troubadour
[1988] Killdozers
[1989] Rody et Mastico
[1990] Secte Noire, La
[1990] Rody et Mastico III
[1990] Rody et Mastico II
[1990] Raiders
[1990] Maupiti Island./images/jeux/maupiti_island.gif
[1990] Black Sect ./images/jeux/black_sect.png
[1991] Vroom ./images/jeux/vroom.png
[1991] Trésor d'Ali Gator, Le
[1991] Crypte des maudits, La
[1992] Vroom Datadisk
[1992] Survivre
[1993] Vroom Multi-player
[1993] Formula One (F1)
[1994] Kawasaki Superbike Challenge
[1999] Official Formula 1 Racing
[2000] Warm up
[2000] F1 World Grand Prix
[2001] Ski Park Manager
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TEST
Pour sa seconde aventure, Jérôme Lange, le célèbre détective du Manoir de Mortevielle, se retrouve à enquêter sur une disparition mystérieuse dans un décor paradisiaque : une île tropicale, luxuriante et isolée, à la beauté troublante, où chaque recoin semble autant nous émerveiller que nous menacer. Avec Maupiti Island, Lankhor signe ce que beaucoup considèrent encore aujourd’hui comme son chef-d’oeuvre absolu. Le jeu marque les esprits, autant par ses graphismes époustouflants, que son aventure aux accents d’exotisme, devenant une référence incontournable du jeu d’aventure du début des années 90 sur Atari ST et Amiga. Pourtant derrière le vernis de ce succès à la française, une autre histoire s’écrit, plus âpre : celle d’un développement éprouvant, de tensions internes et du poids écrasant d’un niveau de qualité tellement exigeant qu’il met en péril l’existence du petit studio.
Madagascar, Janvier 1954. Une lettre de votre ami Max vous invite à le rejoindre au Japon. Vous embarquez à bord du Brisban, direction Karachi. Le capitaine Bob et son second Anton seront vos seuls compagnons de voyage. En plein Océan Indien, un cyclone déchaîné contraint votre bateau à accoster sur l’île isolée de Maupiti. La nuit du 31, un bateau de pêche, le Bamboo, jette également l’ancre sur l’île, à son bord le capitaine Bruce, son second Roy et Chris, un marin. Au petit matin, alors que l’horloge indique 9 heures, Maguy, une habitante de l’île vient à votre rencontre. Elle vous demande de retrouver Marie, une jeune femme mystérieusement disparue pendant la nuit. L’île, aussi envoûtante qu’inquiétante, devient le théâtre d’une nouvelle enquête haletante. Entre secrets enfouis, tensions palpables et personnages énigmatiques, le temps presse : vous n’avez que quelques heures pour découvrir la vérité.

Développé par Lankhor, Maupiti Island est un témoignage de l’époque dorée des jeux d’aventure à l’ancienne. Avec son scénario dense, ses graphismes magnifiques et ses innovations techniques, il reste une expérience unique, même plus de 35 ans après sa sortie.

Ma rencontre avec Maupiti Island, c’était chez un ami qui venait d’acheter un ordinateur aux capacités incroyables. C’était l’ordinateur de l’avenir. Ça s’appelait un Atari 520 STF. A cette époque je possédais encore un Amstrad CPC 464. Je ne m’étais préparer à voir ce jeu et il a tout changé.

L’effet fut sans doute comparable à ce que beaucoup ont pu ressentir en découvrant pour la première fois Dungeon Master sur Atari ST : un avant et un après. Ce genre d’expérience qui redéfinit non seulement les standards techniques et narratifs, mais aussi notre propre relation avec les jeux vidéo.

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La publicité d'époque donnait déjà envie.

Pour beaucoup, Maupiti Island n’est pas qu’un simple jeu. Il redéfinissait tout ce qu’on pensait possible dans un jeu vidéo. Son ambiance immersive, ses graphismes presque irréels, et cette synthèse vocale qui donnait vie à chaque personne, surpassaient tout ce qu’on avait vu ou cru possible dans un média. Une preuve qu’il pouvait être bien plus qu’un simple divertissement, qu’il pouvait transporter, intriguer et émerveiller.

Dès lors, ce jeu me hantait. Il me le fallait. Il me fallait cet ordinateur incroyable. Et trouver du plaisir sur mon Amstrad CPC devenait presque impossible. Il me fallait acquérir le plus rapidement possible un Atari ST et bien sûr le graal … Maupiti Island.

La suite fut ce que beaucoup ont dû ressentir en se plongeant dans ce jeu : une expérience intense, mélange d’émerveillement devant la qualité et la minutie de la réalisation, de doutes et de frustrations de ne pas tout comprendre dans cette enquête complexe, mais toujours la conviction de tenir dans ces mains une œuvre rare qui fera date.

Que d’heures passées à explorer chaque lieu, chaque recoins, tiroirs ou creux d’arbre où chaque pixel peut être un indice décisif, chaque action anodine peut déclencher un mécanisme dévoilant une cache révélant un objet important.

Bien sûr, dans cet attachement la nostalgie joue beaucoup. Mais au-delà, ce jeu regorge de détails subtils, de trouvailles ingénieuses qui le rendent assez fascinant pour l’époque. Même après autant d’années, ses graphismes restent d’une beauté saisissante, témoignant de l’excellence et du soin apportés par ce petit studio parisien.

UNE GESTATION DIFFICILE

Donner une suite au Manoir de Mortevielle n’était pas une chose aisée. Avec plus de 15 000 pièces vendues en décembre 1989 (source Atari Magazine n°7), le premier jeu de Lankhor a fait un carton plein et est devenu rapidement un phénomène dans ce petit monde, remportant au passage de nombreux prix dont deux Tilt d’Or 1987 pour le meilleur jeu d’aventure ainsi que le Joystick d’Or 1989 pour les meilleurs bruitages.

Ce succès a permis dans un premier temps de payer les dettes et de travailler décemment pendant quelques mois pour préparer deux nouveaux softs. Un simulateur de course — Vroom — et la suite des aventures du détective Jérôme Lange — Maupiti Island.

Les premiers travaux sur Maupiti Island commence dès l'été 1987. Jean-Luc Langlois et Bruno Gourier font un premier jet, une trame de scénario dont l’intrigue se situerait sur une île. Dominique Sablons est à la tâche pour commencer les premières ébauches et recherches nécessaires à un tel projet.

Dans un dossier consacré à Maupiti Island (Fonds Dominique Sablons / CNJV), un petit livret d’une vingtaine de feuillets esquisse les grandes lignes du jeu. L’action se déroule sur une île au large de l’Afrique de l’Est et au sud du Yémen, un ancien repère de pirates. Il y a deux bateaux, un Yacht et un bateau de pêcheur, un bassin, un vieux puit dont il manque une pierre. Quelques informations sont apportées sur les caractères des personnages et leur nom qui ne sont pas définitif. On parle du cadavre de Julie, nom barré qui devient Lucy ! une certaine Lola (sans doute Anita). Le prénom de Marie est mis entre parenthèse.

Dans un reportage diffusé dans le journal de TF1 le jeudi 1er octobre 1987, consacré au Manoir de Mortevielle, quelques photos — aujourd’hui conservés dans le fonds Jean-Luc Langlois du CNJV — immortalisent Sablons en plein travail, penché sur une ébauche d’écran du jeu sans doute « La chambre de Marie ».

games/maupiti_island/sablons_1987.jpg
Dominique Sablons sur un écran de Maupiti Island - la chambre de Marie [Oct 1987 / Photos CNJV Fond Jean-Luc Langlois].

Pour la page de présentation de « Maupiti Island », Dominique Sablons s’inspire d’oeuvres du peintre français René Goulet (1921–2012), réputé pour ses nombreuses peintures de voiliers ou de scènes côtières. L’idée a semble-t-elle germé d’un article de VSD – probablement daté de septembre ou octobre 1987 – consacré à une exposition de l’artiste, où on peut y voir une petite image en noir et blanc d’une de ces peintures.

Article VSD sur exposition René Goulet
Peinture de René Goulet Set 1/2
Peinture de René Goulet Set 2/2
Croquis de Dominique Sablons

Tout est dans ce set de deux tableaux : Le bateau, le traitement des vagues, le jeu de lumière et l’atmosphère si particulière d’être au cœur d’une tempête.

En janvier 1988, lors d’échanges entre Sablons et l’équipe de Lankhor, différentes possibilités de demeures pour la maison de Maguy, le marais ou encore des inspirations pour l’intérieure des cabines ou la plage de l’île sont proposées.

Recherche pour la maison de Maguy
Publicité d’une marque de cigarette
île tropicale
Intérieur de bateau

Pour concevoir les visages des personnages, Dominique Sablons s’est à nouveau inspiré des magazines et des publicités d’époque. Sue, par exemple, trouve son origine dans une annonce télématique aux charmes un peu suggestifs, tandis que Roy reprend les traits d’un homme aperçu dans une publicité pour une compagnie aérienne. Juste, quant à lui, emprunte son apparence à un romancier haïtien. Même le portrait de Lucie, que l’on découvre au fil du jeu, provient d’une image glanée dans ces archives visuelles. Chaque figure naît ainsi d’un collage de références, où l’anecdotique devient matière à fiction.

Sue… haaa Sue
Roy qui attend son avion
Juste, un romancier Haïtien
La photo de la mystérieuse Lucie
games/maupiti_island/gen4.jpg
Première image de Maupiti Island, la chambre de Marie (Génération 4 N° 2, janvier 1988).

En janvier 1988, le magazine Génération 4 n°2 publie un article avec ce qui est sans doute la toute première image du jeu, la chambre de Marie, et une interface sensiblement différente du produit final. Le jeu est annoncé pour décembre 1988.

UN SCENARIO BETON

En décembre 1988, le jeu accuse déjà un certain retard - il ne sortira qu’un an plus tard. Lankhor est une petite société ne comptant que cinq salariés à temps plein, partagée entre le développement de leurs propres logiciels et l’édition de petits jeux indépendants, une double casquette qui mobilise pas mal les équipes.

Bruno Gourier s’occupe lui des relations extérieures de Lankhor, notamment avec la presse, distributeurs, etc… et à ses heures perdues de la programmation – ou inversement. Dans le Micro News n°15 Gourier indique :

En ce moment je travaille sur la programmation de Maupiti Island. Ce qui explique le retard qu’on a pris…

Bruno Gourier, Programmeur Maupiti Island et co-fondateur Lankhor

En janvier 1989, à mi-chemin du développement, Bruno Gourier le développeur et créateur du Manoir de Mortevielle se confie dans une interview parue dans la revue Joystick Hebdo N°10 :

Si je voulais avoir plus d’argent en étant plus cool mais moins responsable qu’avant, je continuerais à faire de l’informatique de gestion, et actuellement je serais à 25000 balles par mois, ce qui n’est pas le cas maintenant. C’est largement en dessous… Je préfère être libre et maître de ce que je fais. Techniquement, on est pas du tout des débutants. Maintenant, on n’est pas des bêtes de marketing

Bruno Gourier, Programmeur Maupiti Island

Une confession franche et révélatrice, mélange diffus de satisfaction de vivre sa passion mais aussi une certaine frustration de ne pas réussir à en vivre pleinement. Le journaliste termine son article par un constat partagé « Lankhor vit sur le passé, ou vers le futur, en tout cas pas au présent »

Monopolisés par leurs activités annexes, Jean-Luc Langlois et Bruno Gourier font appel à Sylvian Bruchon pour travailler sur le scénario. Jean-Luc Langlois confesse la situation de cette époque dans le livre « 101 jeux Amiga «

On s'est sûrement un peu trop axé vers l'extérieur à ce moment-là : nous étions devenus éditeur, et étions tout simplement trop peu nombreux.  

Jean-Luc Langlois, Co-fondateur de Lankhor
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L’article paru dans le Tilt n°94

Avec plus de 450 phrases préenregistrées constituant près de 50 minutes de dialogue, le scénario a nécessité un travail acharné de presque une année, où toutes les demi-heures, chaque lieu, chaque personnage, chaque événement y est décrit minutieusement. Une profondeur narrative rare, pour ne pas dire unique pour un jeu de cette époque.

Dans le Tilt n°94 d’octobre 1991, un article passionnant revient sur le travail de scénariste de Sylvian sur Maupiti Island. On y découvre les coulisses de l’écriture de l’intrigue, notamment la construction narrative et les contraintes techniques.

Mais le véritable trésor de cette publication se cache en filigrane : une photographie d’un document rare, presque mythique pour les passionnés du jeu. Il s’agit d’une page issue du scénario original, détaillant les événements jour après jour, demi-heure par demi-heure — une sorte de chronologie matricielle sur laquelle repose toute la mécanique de l’intrigue. Ce document, longtemps rêvé, relevait pour moi du pur fantasme.

Et puis, un jour, au cœur des archives du CNJV, dans le fonds Dominique Sablons, j’ai eu la surprise — et l’émotion — d’en retrouver une version manuscrite. En exclusivité, je vous la dévoile ici.

Les archives étaient loin d’avoir révélé tous leurs secrets puisqu’on y trouve aussi l’emploi du temps de chaque personnage.

Sylvian résume l’intrigue :

Neuf personnages se baladent dans l’île de Maupiti où un crime a été commis. Vous pouvez dialoguer avec eux, les suivre dans l’île, vous cacher, les observer, leur opposer un témoignage recueilli auprès de quelqu’un d’autre, bref deviner leur motivation, leur façon de se comporter et les forcer à vous révéler ce qu’ils cachent. Le passage à tabac ou l’argent peut également être un moyen de persuasion efficace. Il y a 450 phrases différentes, en sus des sons et bruitages que vous pouvez entendre dans cette enquête. J’ai essayé de donner un style différent pour chacun, de bien les situer psychologiquement, de donner une consistance à leur existence. Cela m’a pris neuf mois de travail. Les contraintes de dialogues sont assez fortes pour le passage à la synthèse vocale, car les phrases doivent être courtes, compréhensibles, informatives, mais pas trop et non répétitives. Ensuite, il s’agit de prévoir toutes les actions du joueur, de mettre un peu d’humour dans les réponses et de ne pas se mélanger quand on met tout ça dans le prochain, qui s’appellera vraisemblablement « Le pavillon de Thé » (ndla : Sukiya)

Sylvian Bruchon, Scénariste de Maupiti Island

Dans l’Atari Magazine n°7 de décembre 1989, Sylvian Bruchon revient sur cette expérience.

Je n’y connaissais absolument en informatique. J’ai essayé de prêter la main, avec maladresse au début, mais avec pas mal d’enthousiasme. L’histoire était déjà écrite dans ses grands traits par Bruno et Jean-Luc. On pourrait la définir comme une enquête psychologique, avec un fond historique réel, une trame fantastique et une intervention du temps. Si vous ne faites rien pendant une heure de temps (subjectif), certains événements vont se produire. 

Sylvian Bruchon, Scénariste de Maupiti Island

Alors que le scénario situe l’action dans l’Océan Indien au nord de Madagascar, l’île de Maupiti, la vrai, est un minuscule atoll en plein Pacifique, à l’ouest de Bora-Bora. Cette entorse géographique, le scénariste Sylvian Bruchon l’explique dans le Micro News n°49.

C’est un pur hasard. On cherchait un nom imaginaire pour une île et quelqu’un a proposé Maupiti. C’était peut-être une réminiscence, un nom enfoui dans la mémoire qui est revenu par inadvertance  

Sylvian Bruchon, Scénariste de Maupiti Island

Jean-Luc Langlois le confirme dans le livre « 101 jeux Amiga » :

Je pense que c'est le hasard ! Bruno avait trouvé le titre et il me semble qu'il n'était pas au courant. Dominique Sablons s'était inspiré de l'ambiance de ce type d'île, mais pas de celle-ci spécifiquement.  

Jean-Luc Langlois, Co-fondateur de Lankhor

Si le cadre exotique offre un contraste apparent avec l’oppression du vieux manoir, la sensation d’enfermement reste un point central du jeu : l’île, cernée par les flots, devient elle aussi une prison à ciel ouvert mettant constamment à l’épreuve, vos nerfs et votre sang froid où seul votre esprit de déduction pourra peut-être vous guider dans votre enquête, voir à vous sauver d’une mort certaine.

Loin des stéréotypes manichéens, Maupiti Island ose une écriture mature. Les personnages ne sont pas caricaturaux, ni bons ni mauvais, mais souvent ambigus, porteurs de blessures ou de secrets enfouis qu’il faudra découvrir. Les dialogues, avec un phrasé souvent coloré, révèlent peu à peu des fragments de vérités qui s’entrecroisent sans jamais livrer une version unique des faits. Comme dans la réalité chacun semble avoir sa propre réalité des faits, et son coupable désigné.

C’est cette profusion narrative qui fait toute la richesse du scénario du jeu. Le joueur n’est pas guidé vers une vérité unique ; il doit la construire lui-même, à travers ses observations et ses déductions. Ce choix, audacieux, confère au jeu une profondeur rarement atteinte à l’époque mais qui a l’inverse rende la résolution de l’énigme, plus complexe et moins accessible.

Dans un article paru dans le Tilt n°94, Sylvian explique :

Je me suis attaché à créer une ambiance particulière et à faire voyager le personnage. En partant de ces deux envies, j’ai écrit un synopsis de quelques lignes qui situe le lieu, l’intrigue… Pour développer cette idée, il a fallu me documenter. C’est une partie essentielle dans l’élaboration de mes scénarios… Avec ces nouveaux éléments, le synopsis s’étoffe. Sous forme de tables, je représente les différents lieux, les objets, les événements qui font agir les personnages. Une fois cela fait, je prévois ls réponses en fonction de l’emploi du temps des personnages. Après c’est aux programmeurs de prendre le relais. Cependant je m’intéresse au travail sur les images fait par les graphistes. Bien évidemment, je participe aux nombreux tests et aux préversions. Il faut compter un an et demi environ pour écrire un jeu comme Maupiti.

Sylvian Bruchon, Scénariste de Maupiti Island

Concernant les difficultés dans l’écriture, il confie :

Tout prévoir et ne pas perdre le fil de l’histoire ! Déterminer toutes les imbrications entre les événements, les personnages, les actions… il faut savoir s’arrêter.

Sylvian Bruchon, Scénariste de Maupiti Island

Dans le magazine Dream n°16, Christian Droin l’un des programmeurs de Maupiti Island donne sa vision du jeu d’aventure.

Un bon jeu est avant tout construit autour d'un bon scénario, c'est-à-dire une histoire solide qui maintiendra le joueur perpétuellement en haleine, lui donnera l'occasion de mettre en place un système de réflexion personnelle, de laisser libre cours à son imagination, mais sans jamais le laisser totalement à l'abandon.

Si une enquête policière a besoin de plus de réalisme qu'une aventure de science-fiction ou à caractère fantastique, dans tous les cas, plusieurs éléments semblent indispensables pour maintenir l'intérêt du joueur : des actions à caractère immédiat demandant un bon sens de l'observation et de l'astuce (ouvrir une porte grâce à un mécanisme secret), des actions décalées dans leur effet, des objets à récupérer pouvant servir plus tard, des discussions avec les personnages permettant de comprendre leur psychologie, la mise en relation de divers événements permettant de comprendre l'intrigue.

Christian Droin, Programmeur Maupiti Island

En avril 1990, après presque trois années d'un travail acharné, et de nombreux reports, c’est la délivrance. La nouvelle enquête de Jérôme Lange est enfin disponible dans les magasins d’abord sur Atari ST puis quelques semaines plus tard au mois de juin sur Amiga, et bien plus tard en mars 1992 sur PC.

Jean-Luc Langlois cofondateur du studio revient sur ce délai anormalement long dans un article paru dans l’Atari Magazine n°7 de décembre 1989:

 Nous sommes très exigeants tant en ce qui concerne le son, que le graphisme ou le scénario. Ce qu’a fait Dominique Sablons pour le graphisme, vous pouvez en juger sur pièces, est remarquable. Une partie de la trentaine de lieux et des 160 objets a été digitalisée puis retravaillée (personnellement je trouve que ses dessins originaux sont meilleurs que les digitalisations). Seulement, un beau dessin n’est pas tout. Il doit correspondre à une partie du scénario, et servir dans le jeu. Il a fallu énormément discuter, argumenter et convaincre, jusqu’à obtenir ce que nous voulionss pour coller au déroulement de l’action. Intention, à une atmosphère, à une énigme. Dominique a su parfaitement s’en tirer. 

Jean-Luc Langlois, Co-fondateur de Lankhor

LE RETOUR DE LANGE

Après avoir déambulé dans les pièces délabrées d’un vieux manoir isolé par une tempête de neige, place à l’exotisme dans un huis clos bien plus inattendu mais tout aussi dangereux : une île isolée, baignée de soleil, de mystères... où derrière l’image de la carte postale se cache une tension latente, presque hitchcockienne, prémices d’événements inattendu et tragiques.

Dès l’accostage, le ton est donné. Maguy, une habitante de l’île vient à votre rencontre pour solliciter votre aide. Une jeune femme, Marie, a mystérieusement disparu la nuit précédente. Toute la trame principale de votre enquête sera de découvrir ce qu’il est advenu de Marie. A-t-elle décidé de quitter volontairement l’île ? A-t-elle été enlevée ou pire… supprimé ?

Une disparition inquiétante qui plonge le joueur dans un huis clos oppressant : Entre les tensions papables entre les habitants, les secrets enfouis, et une ambiance pesante où chaque détail compte. Le temps est compté : l’enquête doit être résolue avant que le bateau ne reparte, ajoutant une dimension d’urgence à tout ce drame.

C’est dans cet environnement faussement paisible que le détective Jérôme Lange, bloqué encore une fois par l’inénarrable concours de circonstance, les intempéries, va se retrouver embarqué dans une enquête mêlant disparition, meurtre, mensonges et jalousies.

Maupiti Island* offre une liberté rare pour son époque. Vous pouvez explorer l’île à votre guise, interroger les habitants, collecter des indices, et même confronter les suspects en croisant leurs témoignages. Le système de gestion du temps est particulièrement remarquable : les événements évoluent en fonction de l’heure, et certains indices ou rencontres ne sont accessibles qu’à des moments précis.

Chaque action, chaque mot échangé peut avoir des conséquences. Le jeu pousse le joueur à une réflexion constante, à prendre des notes, et à établir des hypothèses, comme dans un véritable roman policier.

L’un des aspects les plus marquants, et parfois rebutants pour certains, de Maupiti Island réside dans sa gestion du temps. Chaque personnage possède son emploi du temps. Les événements surviennent à des horaires précis et être au bon endroit au bon moment s’avère nécessaire pour progresser dans l’enquête. Certains lieux ne sont accessibles qu’à une heure donnée, ou avec une action précise comme une clé ou un mécanisme, et les balades nocturnes révèlent souvent des indices essentiels.

Maupiti Island demande rigueur, patience et perspicacité. L’enquête est une véritable partie d’échec psychologique avec une dizaine de suspects. Un coup de feu ! Une perruque à moitié calcinée dans un poêle, autant d’indices qui pourront vous conforter dans vos convictions ou remettre en question vos certitudes. Mais chut !!! Un bon détective choisi toujours le moment opportun pour abattre ses cartes.

Ce réalisme, couplé à la complexité des relations entre les personnages, donne au jeu une dimension quasi romanesque. On y retrouve l’influence des grands récits d’Agatha Christie bien sûr — notamment Le Crime de l’Orient-Express, Mort sur le Nil — mais aussi du roman noir français.

UNE ÎLE TROPICALE SOUS TENSION

L’ambiance qui se dégage de l’ensemble est unique : un mélange de calme apparent et de menace diffuse, qui n’est pas sans rappeler les atmosphères de certains films noirs tropicaux, comme « Plein Soleil » de René Clément avec Alain Delon.

Le creux des palmiers peut cacher bien des trésors. [Atari ST]

De manière similaire, Maupiti Island place le joueur dans un décor paradisiaque — une île tropicale isolée, baignée de soleil, bordée de plages idylliques — qui constitue un écrin trompeur pour une intrigue lourde de secrets, de jalousies et de menaces latentes. Le cadre idyllique ne fait que renforcer le suspense : la beauté du paysage accentue le caractère inquiétant des événements, car il crée une dissonance entre le lieu et l’action.

Derrière la beauté des lieux et la douceur de vivre se cache des jeux de duplicité et des tensions mortelles, Maupiti Island propose une exploration psychologique à travers ses personnages, dont les relations sont complexes et ambivalentes. La convivialité apparente et le calme de l’île laissent rapidement place à une atmosphère lourde, où chacun semble dissimuler quelque chose.

Cette ambivalence est un élément clé de l’immersion. Le joueur, comme le spectateur, est invité à scruter les détails, à décoder les non-dits, et à s’interroger sur les véritables intentions des protagonistes. L’éclat solaire ne dissipe pas l’ombre portée des mensonges et des crimes : il la souligne, la met en lumière.

Le joueur est invité à observer, à écouter, à interpréter : l’action est lente, mais la tension permanente. Manipulation, mensonges, menaces, autant de tension cachée sous le vernis d’un décor luxuriant.

UNE DIRECTION ARTISTIQUE AMBITIEUSE

Le premier choc en découvrant Maupiti Island, ce sont ses graphismes. Les environnements riches et variés, dans un style photo-réaliste, sont d’une beauté saisissante pour l’époque. Chaque écran est un plaisir pour les yeux, une peinture vivante, où Dominique Sablons, décidément très inspiré, nous repeint avec style cette petite île coloniale des années 50 où il se dégage un parfum suranné. On a d'ailleurs peine à croire qu'il n'y a finalement que 16 couleurs. Les teintes chaudes – sables, ocres, orangés – donnent à l’ensemble un caractère intemporel. A l’image d’une vieille carte postale d’un autre temps, le temps semble s’être suspendu sur cette atoll.

Première pub Lankhor mentionnant Maupiti dans le TILT de 1988 avec un cover signé Dominique Sablons mais non utilisé sur le produit final.

Le soin minutieux accordé aux moindres détails visuels — ombres qui glissent au fil des heures, ondulations des vagues, va-et-vient las des ventilateurs, mouche qui vole dans la cabane de Juste, ou encore souris qui traverse les coursives — insuffle à l’île une présence tangible, comme un autre personnage à part entière de l’aventure. Ces touches discrètes, presque imperceptibles, participent pleinement à l’immersion et renforcent, par leur souci du détail, le climat d’étrangeté et de tension sourde qui nimbe chaque recoin du jeu.

Ce piano doit contenir plus que des cordes. [Atari ST]

Graphiquement, Maupiti Island impressionne encore aujourd’hui. Les décors, dessinés à la main, regorgent de détails, et chaque lieu a sa propre ambiance et une part du mystère : la plage brûlante, les jardins foisonnants, les chambres aux plaisirs libertins, le bassin aux sables mouvants, le vieux puits aux secrets oubliés... Rien n’est laissé au hasard. Cette richesse visuelle renforce l’immersion, d’autant que l’interface, bien que datée aujourd’hui, était étonnamment ergonomique pour l’époque.

En tout on dénombre une trentaine de lieu, leur diversité et leur richesse compensent largement cette limitation. Tous ne sont pas accessible dès le début, certains nécessiteront de trouver une clé ou un mécanisme caché, d’autres ne seront accessibles qu’à certaines heures, par exemple en marée basse. Le temps, ici, n’est pas une simple mécanique, mais un acteur à part entière. À chaque demi-heure, les lieux se métamorphosent, les rayons éclatants du soleil laisse place la nuit à un lieu lugubre et menaçant, propice à toute forme de rencontre, bonnes ou mauvaises.

Deux ans séparent Maupiti Island de son prédécesseur, pourtant le contraste avec Le Manoir de Mortevielle est saisissant : les progrès sont manifestes, à tous les niveaux.

Son inspiration, Dominique Sablons la trouve dans les magazines de voyage, nautique ou généraliste sur l’actualité de type VSD comme en témoigne le contenu de ses archives au CNJV.

D’autres améliorations ont été apportées par rapport au Manoir. Dans Maupiti les tableaux sont animés pour donner plus de vivacités au jeu. Vous avez par exemple dans une image un gros ventilateur sur 8 sprites qui brasse l’air, la souris qu’on déplace au 1/50e de seconde, le menu déroulant, du son et le programme tourne en-dessous, sans que jamais cela ne bloque et ne donne une image heurtée. Je crois qu’on a fait un sacré bon boulot de programmation ! Vous pourrez sauvegarder l’enquête à n’importe quel moment et celle-ci finira par un questionnaire pour voir si vous avez bien tout trouvé.  

Jean-Luc Langlois, Co-fondateur de Lankhor

LES PERSONNAGES

Les déplacements, les interactions avec les objets et les personnages se font de manière assez intuitives grâce à une interface plutôt simple et agréable, en grand partie reprise du Manoir de Mortevielle mais totalement repensée.

Maupiti Island offre une liberté de mouvement presque sans contrainte : vous êtes libre d’explorer l’île à votre convenance, bien que certaines zones, comme une chambre fermée à clé, ne soient accessibles qu’à des moments précis, ou à condition de mettre la main sur la clé.

Chaque rencontre avec un personnage ouvre des possibilités multiples : engager la conversation, confronter les témoignages, montrer un objet, soudoyer, menacer, suivre discrètement… mais attention à ne pas éveiller les soupçons. Cette mécanique, ingénieuse et immersive, vous permet ainsi d’ouvrir de nouvelles pistes et renforce l’impression d’être un véritable détective, plongé dans une enquête aussi complexe que palpitante.

Tous les protagonistes que l’on croise sur l’île — Juste, Anita, Anton, Sue, Chris, Roy, Bob, Maguy, Bruce ou encore l’insaisissable Dame en noir — forment une galerie de personnages hauts en couleur et subtilement écrits, chargé d’une histoire propre, de non-dits, de blessures se dévoilent au fur et à mesure de votre progression. À mesure que l’enquête avance, le joueur comprend qu’ici, personne n’est totalement innocent, et que chaque sourire cache peut-être une faille, un mensonge, un souvenir trop lourd. Ils ne sont pas de simples figurants. Chacun est un rouage essentiel dans la mécanique narrative, et leurs motivations, parfois contradictoires, forment une partie de la solution à cette enquête.

Quant à l’énigme elle-même ? Elle frôle parfois l’absurde tant elle est complexe, retorse à souhait, presque insoluble sans aide extérieure. Mais peu importe. Car l’essence de Maupiti Island n’est pas tant dans la résolution de la totalité des énigmes que dans l’expérience de jeu. Ce qui marque, c’est l’atmosphère. L’étrangeté rampante. L’impression d’évoluer dans un roman interactif où chaque geste peut faire basculer l’équilibre précaire de cet environnement.

Voici un portrait des personnages de l’île :

L’hôtel de Maguy

Maguy est la tenancière de la maison « libertine » de l’île. Autoritaire et pragmatique, c’est un personnage central de l’enquête et une femme d’affaires qui ne recule devant rien pour protéger ses intérêts, et ses filles comme elle les appelle. Elle gère son établissement d’une main de fer mais sais aussi faire preuve d’écoute. Anita dit même d’elle que c’est « Une vraie mère poule pour nous tous », quant à Juste son homme à tout faire « La maîtresse est très bonne. Elle m'a appris à aimer Jésus-Christ ». Ben voyons et pourquoi pas Mère Teresa ! Mon instinct me dit que Maguy cache bien d’autres secrets que ses activités illicites de prostitution. Est-ce que cela pourrait être lié à la disparition de Marie ?

Sue est une des filles qui travaille pour Maguy, laquelle la décrit sous ces termes « Un beau brin de fille et pas fainéante avec çà ». Elle a eu une relation avec Bob et semble encore éprouver des sentiments pour lui. Marie aurait-elle pu être la victime de la jalousie de Sue ?


Anita travaille aussi pour Maguy. Sa meilleure amie de Sue vous confiera son passé de communiste et une enfance difficile. Elle semble avoir une piètre opinion d’elle-même « Moi je ne suis rien. Je ne compte pas. Je vends mon corps pour quelques dollars. Je ne suis qu'une putain. ». Ses relations avec Marie n’étaient pas au beau fixe, elle vous dira même de sa disparition « C'était une petite garce, je ne vais pas la regretter ». Bob ne la supporte plus au point de la menacer « Dite lui de faire gaffe à ce qu'elle dit, un malheur est vite arrivé ». Une certaine amertume semble s’être installer entre Marie et les filles de l’île. Anita aurait-elle pu vouloir se venger de Marie ?

Marie. Bien que sa disparition soit au cœur de l’intrigue, on ne sait pas grand-chose de Marie. Les habitants sont aussi plutôt avare dans leur confidence même Maguy. Les premières investigations révèlent que Maguy la chaperonnait comme sa propre fille et que Bob, le capitaine du Brisban — le bateau qui vous a mené jusqu’à l’île — en pince salement pour elle. Une rivalité semble s’être nouée entre Marie et Sue, l’ex de Bob. Pourtant Sue vous parle d’elle en des termes anormalement élogieux, peut-être trop pour être sincère « Tout le monde l’adorait ». Les dernières heures avant sa disparition restent floues. A-t-elle été la victime d’un triangle amoureux, ou était-elle impliquée dans une affaire plus trouble ?

La cabane de Juste

Juste est l’autochtone de l’île, il mène une vie simple dans sa « cabane faite de bric et de broc » Sue dit de lui que c’est le « dernier des Maupitis ». Pêcheur solitaire, homme à tout faire de l’île, tout le monde semble l’apprécier. Tous ? pas sûr. Quelques heures après votre arrivé son corps est repêché sans vie. Accident ? Meurtre ? Savait-il quelque chose sur la disparition de Marie et a-t-on voulu le faire taire ?

Les Marins du Brisban

Bob est le capitaine du Brisban. Il a roulé sa bosse et a parfois l’alcool facile, comme le dirait Bruce « tous les deux, je crois bien qu'on a écumé toutes les tavernes de tous les ports de la terre ». « La disparition de Marie lui a mis un sale coup » confie Anton. Constamment sur la défensive, il n’est pas du genre à se laisser faire et n’hésites pas à user du poing ou des menaces. Fou de Marie, mais cela était-il réciproque ? Chris vous lâchera sur cette relation « D'après ce qu'on m'a dit, Marie n'en voulait pas. Alors, il l'a peut-être refroidie ». Un suspect de plus et en bonne place.

Anton est le second du capitaine du Brisban. Tout le monde dit de lui que c’est « un bon marin, il connait son métier ». Il travaille souvent à bichonner le moteur du bateau et à l’occasion se laisse tenter par d’autres plaisirs plus coquins. Juste dit de lui « Il court tout le temps après les filles », notamment Anita. Un profil trop lisse pour être honnête. Que sait-il exactement sur la disparition de Marie ?

Les Marins du Bamboo

Bruce est le capitaine du Bamboo. Un homme bourru et pas facile à vivre. Il semble avoir noué une relation de longue date avec la mère maquerelle de l’île Maguy. Ses nombreux voyages m’incitent à penser que le vieux brisquard a d’autres activités pas très nettes pour assurer ses vieux jours. Ce qui en fait un personnage potentiellement dangereux. Juste ne le porte pas dans son cœur et dit de lui « Je ne l'aime pas. Il est méchant avec moi ». Marie aurait-elle pu être le témoin involontaire de ses activités douteuses ?


Roy est le second du Bamboo. D’un tempérament pas facile, il a une certaine expérience, si bien que Chris dit de lui « c'est lui qui commande à bord. Et ce n’est pas tous les jours la fête. » Il semble apprécier particulièrement la compagnie de Sue. Quelques heures plus tard, il échappe à des coups de feu. Ce qui peut faire penser qu’il en sait plus qu’il ne dit sur la disparition de Marie et qu’on veut le faire taire ?

Chris est un marin du Bamboo. Un étrange marin je pourrai même dire. Roy dit de lui « Il a embarqué il y a deux jours, il ne savait pas où était bâbord et tribord ». Quand il ne répare pas le bateau, il passe son temps à fouiner, l’air de rien, les oreilles tendues ou dans les bras d’Anita qui dit de lui : « Ce gars-là est louche. Il doit trafiquer dans des combines pas très catholiques. Croyez-moi ». Ses intentions restent troubles et sa présence n’a rien d’un hasard. Que fait-il sur l’île et que cherche-t-il ? est-ce en relation avec la disparition de Marie ?

MUSIQUES ET BRUITAGES

Loin d’être anecdotique, l’aspect sonore a été particulièrement soigné dans Maupiti Island.

Maupiti ne se contente pas de séduire, d’attirer le chaland par ses images sublimes, elle étonne aussi par son ambiance sonore. Car c’est à l’oreille que l’île se révèle. L’île est là, invisible encore, mais on la devine déjà, sous la brume. Elle soupire, elle bruisse, elle se dévoile dans le moindre craquement du bois ou le chant lointain du vent, devenant une composante narrative à part entière.

Dès les premières notes, la musique d’introduction nous envoute et installe une atmosphère mystérieuse et enveloppante, évoquant l’ouverture d’un vieux film noir tropical — un croisement improbable entre Plein Soleil et L’Île mystérieuse. On y sent un parfum d’exotisme lointain, teinté d’inquiétude, comme si derrière la beauté des lieux s’annonçait déjà quelque chose de plus trouble, de plus enfoui. À mi-chemin entre la contemplation et l’inquiétude, cette musique d’introduction agit comme une porte d’entrée sensorielle dans l’univers du jeu : c’est l’attente avant le mystère, l’entrée dans un huis clos tropical où le soleil ne parvient jamais tout à fait à dissiper les ombres.

Dans Maupiti island, André Bescond nous délivre une partition musicale de toute beauté. Plus qu’une simple fioriture, ses compositions subtiles, tendues, presque organique insufflent au jeu une âme propre, presque palpable, où l’atmosphère s’épaissit au fil des heures. 24 thèmes oscillant entre mélodies exotiques, parfois enjouées et ambiances inquiétantes vous suivront le long de votre enquête. Encore aujourd’hui, il suffit d’écouter quelques notes de la langoureuse musique d’introduction aux accents jazzy pour que resurgisse le souvenir de cette île envoûtante, comme si elle continuait de vivre, quelque part, dans un recoin oublié de notre mémoire.

À cela s’ajoute une bande-son minimaliste, faite de bruits d’ambiance et de dialogues digitalisés — une prouesse technologique en 1990, et l’une des marques de fabrique du studio Lankhor.

L’atmosphère s’y distille dans les sons, les chuchotements, les bruissements presque imperceptibles… ici, aucun bruit n’est anodin.

L’ambiance sonore, elle contribue grandement à l’immersion : les bruitages marins, les voix digitalisées, la musique discrète mais évocatrice… tout concourt à instaurer une atmosphère à la fois paisible et menaçante. On est loin des clichés touristiques : ici, l’île cache ses secrets derrière des palmiers et des sourires de façade.

Chaque lieu dégage sa propre ambiance avec ses propres sonorités : ressac des vagues, bruissements de feuillage, craquement de la coque du bateau, ventilateur qui ronronne, une mouche qui tourne, une porte qui claque. Les bruitages sont discrets, parfois menaçants mais font partie intégrante du décor, soigneusement introduit selon les lieux et le plus souvent accompagnés de petites animations en tout genre, même les touches du piano-bar s'enfoncent sur le rythme du boogie-woogie.

L’un des éléments marquants de Maupiti island c’est sa synthèse vocale. Sans matériel supplémentaire, les personnages s’expriment de vive voix, avec un timbre propre, parfois rugueux ou traînant, donnant une incarnation inédite aux dialogues. Cette technique révolutionnaire, héritée du Manoir de Mortevielle, est ici poussée encore plus loin : les échanges deviennent plus naturels, plus vivants, et servent directement la tension dramatique du huis clos. Le joueur ne lit plus seulement les mots, il les entend, il les ressent.

Ce système repose sur des bibliothèques de phonèmes, des fragments sonores de base enregistrés à l’aide d’une carte sonore de type ST Replay. Ces phonèmes sont ensuite enchaînés dynamiquement grâce à une routine fonctionnant en interruption, c’est-à-dire en permettant au jeu de parler sans interrompre son déroulement. L’ajout d’interphonèmes et d’un algorithme de lissage sonore réduit l’effet saccadé typique de cette technologie, offrant une meilleure fluidité sans pour autant éliminer complétement la rugosité de l’élocution. La place occupée en mémoire n’étant que celle de la bibliothèque, Maupiti Island compte près de 450 répliques vocales, s’imposant aux côtés du Manoir de Mortevielle ou de Troubadour comme l’un des rares titres à utiliser cette technique sur Atari ST et Amiga.

En fait, il n'y a pas eu vraiment d'amélioration dans le rendu, au contraire puisque les données sont encore plus compressées, pour prendre moins de place. Par contre la compétence de Béatrice était meilleure, elle avait acquis une grande expérience sur l'outil (qui permettait notamment de jouer sur les fréquences et intonations) et elle arrivait de mieux en mieux à assouplir le phrasé.

Jean-Luc Langlois, Co-fondateur de Lankhor

Si le rendu des voix est certes un peu métallique, il contribue fortement à l’ambiance étrange et feutrée du jeu.

À cela s’ajoutent des bruitages subtils et une bande-son discrète mais efficace, qui soulignent parfaitement l’ambiguïté du lieu.

Maupiti Island a été particulièrement exigeante sur le plan technique, car nous souhaitions que le jeu fonctionne de manière fluide, que la souris réagisse à une fréquence d'au moins 20 Hz, entre autres défis techniques. Il y avait également un grand nombre de technologies en jeu, notamment pour gérer les ambiances, les animations, et plus encore. Du point de vue technique, ce projet a nécessité un énorme investissement, mais nous voulions que tout cela reste imperceptible pour les joueurs. Nous avons consacré énormément de temps à cette tâche.

Ce qui rend ce jeu particulièrement spécial, c'est qu'il était riche à tous les niveaux. Bruno et moi avons collaboré sur le scénario, en le créant ensemble, puis nous avons fait appel à quelqu'un d'autre pour rédiger l'intégralité des dialogues. Nous n'avons pas lésiné sur la complexité de l'histoire. Nous avions l'équivalent de près de deux heures de dialogues, ainsi qu'une quantité considérable de musique. C'était un véritable défi de réussir à faire tenir tout cela dans des disquettes. Il était essentiel que tout cela tienne dans une disquette double 720K.

L'objectif était clair : lorsque vous voulez donner la parole aux personnages, vous devez optimiser au maximum l'utilisation de l'espace. Cela nous a conduits à explorer diverses astuces et techniques pour réussir à raconter une histoire complexe dans un espace aussi restreint.

Jean-Luc Langlois, Co-fondateur de Lankhor

En définitive, Maupiti Island propose une expérience sonore d’une rare richesse pour un jeu vidéo du début des années 90 : une bande-son intégrée à la narration, techniquement audacieuse, et artistiquement cohérente. Une réussite d’autant plus impressionnante qu’elle fut composée avec des moyens techniques limités de l’époque — ce qui fait qu’aujourd’hui de nombreux joueurs gardent en mémoire cette expérience unique dans le jeu d’aventure.

*** Partition musicale *** https://www.youtube.com/watch?v=eKum2QIGpkM  

UNE PROTECTION MADE IN LANKHOR

Pour protéger son nouveau bébé, Lankhor n’a pas lésiné sur les moyens. « Maupiti island » est connu pour être particulièrement bien protégé et il n’a jamais été déplombé proprement sur Atari ST.

Pensé dès son développement, la protection maison de Maupiti Island se mélange sournoisement à son code. Redoutable dite par « changement de format », ce type de protection modifie le nombre, la taille des secteurs, change les données de contrôle si bien qu’il est impossible de lire la disquette depuis le système d’exploitation de l’Atari ST (TOS). Pour lancer le jeu, il faut obligatoirement passer par un programme auto-boot développé spécifiquement pour lire les données de cette disquette, seul capable de gérer ce format particulier. Toute tentative de lecture alternative soit par le TOS soit lors d’une copie logicielle se révèlera infructueuse, le système n’y verra qu'un support non formaté, ou comportant des erreurs d'écriture.

Même dans sa version crackée sur Atari ST ! le pirate a intégré son propre système de copie sur le boot de la disquette.

Les drives fatigués redoutent les formats spéciaux.

Bien qu’il soit terriblement efficace, ce type de protection a quelques inconvénients et pas des moindres. Le changement de format des données en dehors des normes prévu par l’ordinateur, pose des problèmes de fiabilité des périphériques, en particulier lorsque le lecteur est fatigué ou provient d’une série moins performante.

Un changement de format poussé à l’extrême peut parfois même mettre en difficulté les machines professionnelles de duplication de disquette et c’est ce qui s’est passé pour la première protection de « Maupiti Island » comme l’explique Jean-Luc Langlois dans un dossier spécial sur les protections logiciels paru dans le magazine Tilt n°80 p102 :

On a eu des problèmes de duplication de la première protection qu'on avait faite pour « Maupiti Island ». L'idée était intéressante mais, a la duplication, la protection n'a pas pu passer, pour un problème de fiabilité de I ‘écriture. Ils étaient obligés de sauter les contrôles d’erreur sans lesquels les pistes ne passaient pas.

A la base, on avait un système que l'on ne pouvait pas écrire sur Atari ST. Nous l'avons créée sur Amiga. On avait donc déjà une garantie intéressante puisque, finalement, chaque piste était protégée. Les données elles-mêmes n'étaient pas recopiables. Sur ST, il y a deux façons de lire les fichiers : une façon classique par secteur et une autre qui consiste à lire une piste intégrale. C'est le Readtrack, qui marche très bien sur Amiga mais qui n'est pas fait, en théorie, pour gérer de la donnée sur ST. On a pu dévier le système pour l’utiliser comme tel. Les crackers n'ont pas pu refaire la même chose en créant un système qui puisse relire comme cela, piste a piste. lls ont mis leurs propres routines, ils ont mis un format à eux dans lequel ils ont recréé des secteurs plus grands, chose qu’ils n’auraient pas pu faire si nous avions garder la densité d'informations qu'on avait au départ, parce qu'ils n’auraient pas eu la place. On n’avait pas mis en place une grosse batterie de routines et lorsqu’on a dû revenir a quelque chose de plus standard, on n'avait pas de routines de contrôle suffisantes.

On pensait qu’ils allaient être obligés d’extraire complétement le logiciel, de le comprendre complétement et de recréer des fichiers classiques. On sait qu'ils ont essayé et qu’ils n'ont pas réussi. Mais ils ont pu biaiser.

Jean-Luc Langlois, Co-fondateur de Lankhor

Dans son craktro sur la version anglaise du jeu et sur le site codetapper, le crackeur Zippy du groupe The Medway Boys indique :

Chaque piste fait $16d2 octets de long et il y avait plus de 450 fichiers sur les deux disquettes. En plus de ce format, ils incluaient également des sommes de contrôle, du code auto-modifiable et quelques autres petites routines anti-piratage désagréables »

Pour réaliser une copie pirate, toutes les données des disquettes d'origine devaient être vidées manuellement une piste à la fois, puis tout devait être reconstruit sur des disquettes standards (10 secteurs de 512 octets par piste), ainsi que la création d'un chargeur de fichiers personnalisé pour intégrer le code de leur système de fichiers.

Le jeu original ne semblait pas être très largement distribué au Royaume-Uni, donc je ne l'ai pas eu avant quelques semaines après sa sortie et comme il fallait des jours pour le déchiffrer et réécrire tout le code de chargement, je devenais de plus en plus paranoïaque chaque jour à l'idée qu'un autre groupe puisse sortir sa version avant que j'aie fini ! Je ne pense pas que quelqu'un d'autre ait déchiffré la version anglaise, mais il y avait apparemment quelques cracks de la version française. C'est peut-être parce que j'ai protégé ma version déchiffrée avec mon wrapper de cryptage sync/trace qu'il n'y a pas eu d'autres versions de la version anglaise, haha. :)

Zippy du groupe The Medway Boys

Bien sûr il ne s'agit pas d'un "vrai" secteur de 12 * 512 octets (6144 octets) / piste car il est bien au-dessus de ce qui peut être lu par l'Atari ST.

En raison de son système de protection particulièrement sophistiqué, Maupiti Island s’avérera incompatible avec l’Amiga 1200 (source : Amiga Revue n°52).

Au final Maupiti Island n’aura jamais été déplombé proprement.

PRESSE ET CRITIQUE

Maupiti Island a reçu le Tilt d'Or Canal Plus 1990 du « meilleur jeu d'aventure » face à Secret Defense : Operation Stealth (Delphine Software) et The Colonel's Bequest (Sierra) qui étaient les deux autres nommés.

Pour présenter le jeu qui s’offre une version anglaise, une partie de l’équipe se déplace à l’European Computer Trad Show (SCTS) de Londres qui se tient le 1-3 avril 1990.

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De gauche à droite : Jean-Luc Langlois, Bruno Gourier, Christian Droin, Daniel Macré [Londres, 1-3 avril 1990 / Photos CNJV Fond Daniel Macré].

EN CONCLUSION

ON AIME...
+ Un des meilleurs jeux d'aventure sur ST/Amiga
+ Une réalisation exceptionnelle (graphismes, musiques, bruitages, scénario)
ON AIME MOINS...
- Une enquête très (trop ?) difficile

Maupiti Island demeure, aujourd’hui encore, un jeu intemporel par son atmosphère, exceptionnel par sa maîtrise technique et frôle par instants la perfection. Longtemps attendu, souvent repoussé, il n’en a que mieux marqué les esprits à sa sortie. Récompensé à juste titre — Tilt d’or du meilleur jeu d’aventure, Gen d’or en 1990 — il s’impose comme l’un des maitre étalon du genre sur Atari ST et Amiga.

Une fois l’enquête achevée, Jérôme Lange devait reprendre le voyage pour faire cap vers le Japon, pour une ultime aventure baptisée Sukiya. Annoncé, esquissé, largement couvert dans la presse spécialisée, le projet n'aboutira pas. Stéphane Polard, en charge des graphismes, avait pourtant réalisé une grande partie des graphismes de cette aventure orientale mais le retard dans le développement et l'échec cuisant de Black Sect en auront voulu autrement.

Aujourd’hui, Lankhor n'est plus. Comme tant d’autres studios français de cette époque si particulière qui a vu naitre ce qu'on appelait alors la french touch. Mais tout ce savoir-faire, toute cette passion, toute cette exigence en terme de qualité qui animaient la petite équipe Lankhor n'a pas été perdu : elle continue de rayonner à travers Maupiti Island.

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Maupiti Island première affiche Dominique Sablons
Maupiti Island toile originale
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EN VRAC
SOLUTION
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